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Le sens de la visite de Michel Deguy

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21022022

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Extraits

Bord

Au bord
Attenant à l’un peu, on trouve le beaucoup ; ils sont de la séquence (« un peu, beaucoup…pas du tout »). Beaucoup, c’est beaucoup d’un peu. « Il boit beaucoup ». L’excès (« passionnément, à la folie ») ne rentre pas dans le rang. Il déborde. « Trop .» Qu’est-ce que le débordement ? L’outrance ; l’hubris, comme on dit volontiers sans être pour autant helléniste. Que saurais-je de la joie, ou de l’amour, de la douleur, si je n’en débordais pas ; s’ils ne m’avaient pas débordé ?
Démesurément. N’est-ce pas la démesure qui invente la mesure, l’overdose, la dose ? La crue invente les bords. Et le centaure Chiron, dit un fragment de Hölderlin, fraye un lit du fleuve à coups de chutes et d’inondations. La fontaine romaine ruisselle à pleins bords, et déborde. Ou plutôt : il faut distinguer le moment du débordement, la colère d’Achille, la folie d’Ajax, l’emportement qui « perd contrôle »,  le moment conséquent, qui peut ne pas venir, que le parler commun (celui qui devient » langue de bois » avant d’être délaissé pour d’autres lieux communs) nomme, depuis une ou deux générations, la « récupération ». Car la canalisation récupère le trop-plein, pour peu qu’on travaille à maintenir le beau débord de la fontaine.
Rejoignons le bord. Sans doute le bord est-il le désiré, le but. Rentrer au port, c’est-à-dire au bord, est le désir (nostos) du regrettant Ulysse, Du Bellay nous le faisait savoir, à nous les écoliers, au temps où on récitait les leçons à l’école. Ai-je le droit de me citer ? Je l’usurpe. À un poème de Gisants, je faisais dire : « pourquoi revient cette formule aimée / « Au bord du monde encore une fois « / Qu’est ce bord ? qu’est-ce « bord », être au bord / La bordure chez Baudelaire et / La terrasse des princes de Rimbaud / Avec vue sur le monde […]. »
Je me donne un « Gauguin » lui-même fait de tous les Gauguins, si je puis dire, comme on songe à « du Gauguin ». L’ekphrasis parlerait au présent de l’indicatif ; au temps poétique du « il y a » (Aragon, Apollinaire, Eluard). Il y a des arbres parmi les chevaux, il y a des assiettes à côté des visages ; des baigneurs à côté de linges, de palmes, de bêtes. Ce sont des plages, des bords, des horizontalités étagées ; la bande du rivage, la bande de l’océan, la bande du ciel, l’oriflamme des éléments ajointés. C’est le bord à bord du monde quand on arrive au monde comme on arrive à la mer. À terre ; au sol ; à plat. À  un unisson du multiple, c’est le monde au bord de lui-même. Où sommes-nous quand nous sommes là et qu’il nous faut l’œuvre pour y être ? Peut-être n’y a-t-il pas d’autre réponse aux trois fameuses questions. Nous sommes à. Aux bords et ainsi auprès. Là d’où nous venons, nous y allons et nous sommes comme si nous étions d’ailleurs. La toile peut le faire voir. L’œuvre comme un talisman apaise le monde en jetant de l’huile dans la tempête.
Du rebord où elle s’accoude, la sagesse, en son grand âge suspendu à la mutité des choses, à moitié penchée sur le monde, à moitié dans le néant, est semblable à Lucrèce contemplant « suavement » le naufrage depuis un rivage escarpé. La Grèce était un archipel (Hölderlin). Il n’y avait que les bords. « Et tout semblait lui servir de bordure », dit Baudelaire – qui ne parlait pas de la Grèce mais d’une beauté de femme. C’est la bordure qui donne accès au tout. Le dieu Pan, avant sa mort, était marin.
 
Encre de Chine
Montagnes célestes
le plus loin devient le plus haut
le très loin le très haut
 
L’en-même temps du haut et bas
égalise le bas le haut de bas en haut :
étapes sages de la montée du Mont
 
Une passerelle très légère
d’une seule phalange ajointe
les monts très séparés
voisins d’abîme
 
Les branches les mousses même
font idéogrammes
Seawulf
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